Héraut Playmobil®, raconte-nous une histoire de la Manche
Héraut Playmobil®, raconte-nous une histoire de la Manche
A travers cette exposition, c’est un véritable retour en enfance que les Archives départementales de la Manche vous proposent. Contactées, en 2013, par deux collectionneurs passionnés par la célèbre marque de figurines Playmobil®, les Archives de la Manche ont reconstitué 8 événements connus ou méconnus de l’histoire de notre département, de l’invasion du Cotentin par Jules César à la Libération de la Manche en 1944.
Vous pourrez ainsi admirez des dioramas historiques de la bataille du Montcastre en 56 avant Jésus Christ, de la prise de Saint-Lô par les Vikings en 890, de l’attaque du Mont Saint-Michel par les Anglais en 1434, du célèbre tournoi de 1559 où le roi Henri II trouva la mort, de la bataille de la Hougue en 1682, du siège de Granville par les Vendéens en 1793, d’une bataille navale au large de Cherbourg en 1864 et, enfin, du débarquement américain à Utah-Beach en 1944.
Une exposition des Archives départementales, Maison de l'histoire de la Manche sous la direction de Jean-Baptiste Auzel, directeur des archives départementales.
Textes, Jérémie Halais et Jean-Baptiste Auzel
56 avant Jésus-Christ, la bataille du Montcastre
C’est entre 58 et 51 avant Jésus-Christ que, menées par Jules César, les légions romaines conquièrent la Gaule. Cet épisode nous est connu par les Commentaires de la guerre des Gaules rédigés par César en personne à l’adresse du Sénat romain.
En 58 av. J.-C., les Éduens, membres d’une tribu gauloise de Bourgogne, font appel à Rome, déjà présente en Narbonnaise (dans le sud de la France) depuis 118 av. J.-C., pour les aider à contrer une invasion helvète. C’est là une aubaine pour César. Le magistrat romain a en effet besoin de se bâtir une stature militaire face à ses concurrents politiques. La Gaule est toute désignée pour assouvir ses ambitions.
En 57 av. J.-C., alors qu’il soumet les peuples belges, son légat Crassus est victorieux en Armorique. L’année suivante, le pays semble pacifié lorsqu’éclate, près de Vannes, en Bretagne, la révolte des Vénètes. César doit livrer un combat naval difficile et charge l’un de ses lieutenants Quintus Titurius Sabinus de combattre, à la tête de trois légions, la tribu des Unelles du Cotentin alliés des Vénètes et commandés par Viridovix.
Les Romains sortent victorieux d’un affrontement dont la localisation fait encore débat. Le texte de César nous apprend ainsi que le camp de Quintus Titurius Sabinus était élevé face au lieu de rassemblement des tribus menées par Viridovix. Cet endroit a longtemps été localisé au Montcastre près de La Haye-du-Puits. Cependant, depuis les années cinquante, le camp du Châtelier situé à 8 kilomètres d’Avranches, sur la commune du Petit-Celland, lui conteste le titre.
890, les Vikings assiègent Saint-Lô
Au IXe siècle, les Normands ou Vikings, profitant de l’affaiblissement des rois Carolingiens, commencent leurs incursions dans le Nord de l’espace franc. Première d’une longue série de raids dans la future Normandie : les Annales regni francorum attestent qu’une flotte scandinave pénètre à l’embouchure de la Seine en 820.
C’est le raid de 889-890 qui est cependant le plus désastreux notamment pour le castrum (place forte) de Saint-Lô. Á l’automne 889, les Danois abandonnent le siège de Paris pour se tourner vers le Cotentin qu’ils gagnent par la mer pour les uns et par la terre pour les autres.
Le récit du siège de la ville nous est principalement fourni par les Chroniques de Reginon de Prüm. Il nous apprend que les Normands "interdisent tous accès à l’eau d’une source, les habitants séchant de soif, se rendent, étant conclu que la vie leur est laissée et que l’ennemi prend le reste." Mais, les assiégeants, ne respectant pas leur parole, massacrent la population. Ce récit est complété par les Annales de Saint-Vaast qui précisent que durant "l’année du Seigneur 890, [...] Liste, qui avait été nommé évêque de la cité de Coutances, [rend] le dernier soupir [dans Saint-Lô]." La prise de la ville et la mort de l’évêque entraînent l’exil du siège épiscopal de Coutances à Rouen jusqu’au XIe siècle.
Las des attaques scandinaves, le roi des Francs, Charles le Simple (898-923), pense que la solution passe par l’unification des bandes vikings sous l’autorité d’un de leurs chefs et l’alliance avec ce dernier. C’est Rollon qui est choisi et obtient, par le traité de Saint-Clair-sur-Epte de 911, les comtés de Rouen, Evreux et Lisieux. En 933, le Cotentin et l’Avranchin, où une population scandinave a fait souche, sont rattachés à la Normandie.
1434, les Anglais à l’assaut du Mont Saint-Michel
La guerre de Cent Ans débute en 1337 mais ne touche la Normandie qu’en 1346, lorsque le roi d’Angleterre Édouard III débarque dans le Cotentin pour revendiquer les droits qu’il dit avoir sur la couronne de France. Dès lors, la Normandie est divisée entre les places occupées par les Anglais et celles qui leur résistent. Le Mont Saint-Michel est finalement la seule forteresse normande que les Anglais ne peuvent conquérir.
En 1423, les Anglais, qui ont fortifié l’îlot de Tombelaine, édifient à Ardevon une bastille pour gêner le ravitaillement des assiégés. Ils ne réussissent cependant pas un imposer un blocus total de la place puisqu’en 1425, leur flottille est défaite par des navires bretons.
Durant toute la guerre de Cent Ans, les fortifications du Mont, protégées par le flux et reflux de la mer, sont suffisamment efficaces pour empêcher qu’il ne tombe aux mains des Anglais. L’îlot devient alors un symbole de la résistance à l’occupant anglais. Conscient du danger que représente, sous la bannière de saint Michel, un sursaut français, le roi d’Angleterre veut y remporter une victoire symbolique. Mobilisant de nombreuses troupes, l’étau anglais se resserre avec la construction de deux nouvelles bastilles à Genêts et aux Pas. Le 17 juin 1434, après un bombardement des fortifications, des troupes donnent l’assaut et s’engouffrent dans le village. Le capitaine anglais Thomas de Scales pense un temps avoir la victoire à portée de main mais celle-ci lui échappe devant la détermination des Montois commandés par Louis d’Estouteville. Il doit finalement se replier enabandonnant sur les grèves ses morts et son artillerie, les "michelettes".
1559, la mort du roi de France, Henri II
Lors du tournoi du 29 juin 1559, le capitaine de la garde écossaise du roi, Gabriel de Lorges, comte de Montgomery et seigneur de Ducey, transperce accidentellement l’oeil du roi de France Henri II avec sa lance. Le souverain agonise dix jours durant et meurt le 10 juillet malgré les soins prodigués par son médecin, Ambroise Paré. Bien que pardonné par le roi sur son lit de mort, le régicide involontaire s’enfuit alors à Jersey où il se rallie, par nécessité politique, au parti protestant. Montgomery est en effet conscient que désormais la reine Catherine de Médicis lui voue une haine tenace.
Les règnes troublés des fils de Henri II sont marqués par les guerres de religion, véritables guerres civiles, durant lesquelles s’affrontent le parti royal mené par la reine mère Catherine, la faction catholique des Guise, et les protestants (ou "huguenots"). En Basse-Normandie, le parti huguenot s’organise autour de Montgomery et le parti catholique derrière le lieutenant général Jacques Goyon, baron de Matignon, futur comte de Torigni et de Saint-Lô.
Dès lors, le conflit oppose régulièrement les deux hommes, à coup de prises et d’abandon de places fortes, d’escarmouches et de batailles. Début mars 1574, Montgomery et ses hommes occupent Saint-Lô où ils sont bientôt encerclés, le 27 avril, par les troupes catholiques de Matignon qui s’empare de la place le 10 juin. Montgomery, qui est parvenu à quitter la place, est finalement capturé à Domfront, puis décapité à Paris le 26 juin 1574.
1692, la bataille de la Hougue
En 1692, en pleine guerre de la ligue d’Augsbourg (1688-1697), Louis XIV rassemble une flotte et des troupes dans le Cotentin dans l’objectif d’aider le catholique Jacques II d’Angleterre à retrouver sa couronne. Chassé du trône d’Angleterre par son gendre, il s’est en effet réfugié auprès de son cousin, le roi de France, qui trouve là l’occasion d’une nouvelle guerre contre l’Angleterre et la Hollande, nations protestantes.
Plus de 20 000 hommes et 70 navires sont ainsi placés sous le commandement d’Anne-Hilarion de Costentin, comte de Tourville. Mais, avant de tenter la traversée et le débarquement, il faut briser la puissante flotte anglo-hollandaise. Le 29 mai, au large de la Hougue, les deux adversaires s’affrontent dans un duel qui voit disparaître deux vaisseaux et 5 000 hommes de la flotte ennemie. Tourville perd 1 800 hommes.
En l’absence de fortifications sur la côte normande, Tourville tente de rejoindre Saint-Malo ou Brest mais une partie de ses navires sont bloqués par les courants du raz Blanchard et doivent revenir vers l’ennemi et se réfugier dans la baie de la Hougue. Le 30 mai, le Soleil Royal, navire amiral de Tourville, le Triomphant et l’Admirable qui ne peuvent suivre leur route, sont échoués au large de Cherbourg puis incendiés par les Anglais. Les autres navires sont échoués à leur tour près de Tatihou, le 2 juin. Le 3 juin, les Anglais les incendient, les uns après les autres.
Cette défaite révèle le manque cruel d’un port militaire sur la côte du Cotentin et la nécessité d’en consolider les défenses ; elle débouche sur la construction des tours de Tatihou et de la Hougue. Le problème est réglé, un siècle plus tard, avec la construction de la rade et du port militaire de Cherbourg.
1793, Granville fait échec aux Vendéens
À l’automne 1793, alors que le parti dit des "Montagnards" impose une dictature, Jean-Baptiste Le Carpentier, député de Valognes, et représentant en mission de la Convention, vient de réorganiser les défenses du littoral manchois face à la menace d’un débarquement anglais. La nouvelle se répand alors que l’armée "catholique et royale", qui s’est levée en Vendée, marche sur la Manche. Après Mayenne, tombée le 2 novembre, Fougères, Antrain et Dol, les Vendéens atteignent Pontorson, le Mont Saint-Michel puis Avranches dont ils s’emparent sans combat. Leur objectif est de prendre un port en espérant opérer une jonction avec d’hypothétiques renforts anglais.
Le 14 novembre, après un premier affrontement à l’extérieur de la ville avec trois colonnes républicaines, les Vendéens atteignent les faubourgs de Granville. Les défenseurs de la ville, dont Le Carpentier a pris la tête, se retranchent derrière les remparts. Durant 28 heures, les assiégeants, soutenus par de nombreuses pièces d’artillerie, lancent, sur la haute ville, des attaques des hauteurs voisines, de la grève et des faubourgs. Quant aux défenseurs, appuyés par les batteries terrestres et les canonnières du port, ils incendient les habitations des faubourgs, où était amassé l’ennemi, et repoussent tous les assauts, obligeant les Vendéens à se retirer dans la nuit du 15 au 16 novembre.
L’échec devant Granville inaugure une longue déroute qui se termine, pour l’armée "catholique et royale", et les civils qui l’accompagnent, par des massacres au Mans et à Savenay, le 23 décembre. Cette victoire républicaine épargne au département de devenir un champ de bataille pour les troupes vendéennes, républicaines, et peut-être anglaises. Elle propulse le député de Valognes au devant du parti des "Montagnards".
1864, une bataille navale américaine au large de Cherbourg
La guerre de sécession américaine (1861-1865) éclate entre les États industriels du Nord (l’Union) et les États du Sud (la Confédération), agricoles et esclavagistes. Si le souvenir de ce conflit reste largement attaché aux grandes batailles terrestres, le domaine maritime n’y a pas échappé. C’est un épisode méconnu de l’histoire américaine qui se déroule en juin 1864, au large de Cherbourg.
Le 10 juin 1864, après 22 mois de campagne dans l’Atlantique, la corvette CSS Alabama, bâtiment de la marine de guerre sudiste, fait escale dans la rade de Cherbourg. Prévenue par le consul américain, l’Union envoie à son tour la frégate USS Kearsarge pour l’arraisonner et la couler. Les journaux anglais et français répandent la nouvelle du combat insolite qui se prépare devant Cherbourg. Il coïncide avec l’ouverture du nouvel établissement des bains de mer et du casino.
Le dimanche 19 juin 1864, alors que les trains, emplis de touristes, arrivent depuis Paris, l’Alabama appareille. Il tire une première bordée sur son adversaire, mais celle-ci manque son but. Du duel d’artillerie qui s’engage, les deux bateaux courant en cercle l’un sur l’autre, c’est le Kearsarge qui l’emporte. Un coup terrible touche à mort la chaudière de l’Alabama. Volant en éclats, le bâtiment essaie de gagner la côte, mais l’eau s’engouffrant dans les cales l’en empêche. Il s’enfonce alors par l’arrière tandis que de toutes parts, des embarcations se précipitent pour sauver les naufragés. 26 marins de l’Alabama perdent la vie ce 19 juin.
1944, le débarquement américain à Utah-Beach
Le 6 juin 1944 au matin, débute sur les côtes normandes la plus grande opération de débarquement jamais entreprise : Overlord. Celle-ci, préparée par les parachutages anglo-américains et l’action de la Résistance, s’opère sur cinq plages ayant pour noms de code : Sword, Juno, Gold, Omaha et Utah. Au soir du 6 juin, le débarquement est un succès : une tête de pont est établie à l’intérieur de la "forteresse Europe".
Dans la Manche, le débarquement débute, dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, par l’assaut aéroporté des 82e et 101e divisions parachutistes américaines dans la région de Sainte-Mère-Église. Le 6 juin, à 6 heures 30, les premières troupes terrestres débarquent à Utah-Beach, sur un espace qui s’étend entre les communes de Sainte-Marie-du-Mont et de Quinéville. Subissant des pertes beaucoup moins importantes qu’à Omaha-Beach, deux régiments de la 4e division américaine sont à terre et contrôlent la plage vers 10 heures.
Après le débarquement, l’objectif américain est la prise du port de Cherbourg, libéré le 22 juin. Les troupes américaines rencontrent un obstacle dans leur progression vers le centre Manche : le bocage normand. L’enchevêtrement de haies, de talus et de chemins creux est un terrain favorable pour des soldats aussi aguerris que les Allemands. La libération de Saint-Lô, le 18 juillet, est le résultat de combats difficiles et meurtriers qui ouvrent cependant les routes de la Bretagne et de l’ouest de la France aux blindés du général Patton. Le département est totalement libéré à la mi-août, et la bataille de Normandie, gagnée pour les Alliés, le 21 août. Les combats de la Libération ont fait environ 3 800 morts civils dans la Manche et 135 000 sinistrés.
Crédits
Héraut Playmobil®, raconte-nous une histoire de la Manche
Une exposition des Archives départementales, Maison de l'histoire de la Manche
2013 - une exposition réalisée à partir de deux collections privées de Playmobil®